“Réinventer la place de marché médiévale pour que la valeur reparte vers les producteurs”
Permettre une redistribution équitable de la valeur pour assurer la transmission des savoir-faire d’une génération à l’autre
Interview de Christophe Longle - co-fondateur
Comment est née votre initiative ? A quels besoins répond-elle ?
Je travaillais dans une société commerciale de distribution quand, il y a 3 ans, un agriculteur de ma famille me fait part de ses grandes difficultés. Moi-même fils d’agriculteur, je m’intéresse à la question et je fais le constat que quelque chose ne fonctionne vraiment pas dans le monde de l’agriculture : 260 exploitations disparaissent chaque semaine, les agriculteurs ne touchent que 6 % de la valeur des produits (le reste est capté par la distribution, la transformation,...), tous les efforts de productivité sont réduits à néant,…
La solution s’impose : il faut que les agriculteurs reprennent la main sur la distribution ! C’est ainsi que naît Casamiam, un site d’e-commerce pour les agriculteurs qui font de la vente directe, et les artisans des métiers de bouche indépendants ( boulangers, bouchers, poissonniers, traiteurs …) .
Casamiam présente plusieurs spécificités par rapport aux solutions déjà connues :
- c’est une solution simple, sur le modèle du « Bon coin » : le producteur peut créer son site web en 30 minutes
- aucune commission n’est prélevée, il suffit d’un abonnement au tarif modique de 17 € par mois
- la vente n’est pas réalisée en ligne : le consommateur réserve ses produits et vient rencontrer le producteur sur le lieu de vente, individuel ou mutualisé entre plusieurs producteurs. Le paiement se fait sur place.
Et ça marche ! Sur les 1 500 premières commandes, 1 497 rendez-vous ont été honorés.
En quoi vous reconnaissez-vous dans l’économie solidaire ?
Nous n’avons pas recherché à nous adapter à l’ESS : ses valeurs se sont imposées en raison de la finalité du projet, qui est de permettre une redistribution équitable de la valeur pour assurer la transmission des savoir-faire d’une génération à l’autre.
Pour les consommateurs, qui sont déjà 50 % à utiliser le digital pour faire leurs courses (pour les drive, par exemple) , il s’agissait de leur faciliter l’accès à des produits de qualité, à un coût accessible pour toutes les bourses, et en particulier pour les plus défavorisés.
D’un point de vue écologique, en favorisant la production et la distribution locale, on limite la production de plastique, on favorise la biodiversité (les gros transformateurs limitent leurs commandes à seulement 2 ou 3 variétés) et la préservation des paysages.
Quelles sont les difficultés que vous rencontrez ?
D’un point de vue technique, tout va bien : la plateforme fonctionne parfaitement et les producteurs s’en sont saisis sans problème.
Mais nous avons besoin de beaucoup de temps pour assurer le développement commercial qui suppose de contacter individuellement les producteurs. Le bouche à oreille ne suffit pas. Nous avons élargi la plateforme aux artisans indépendants des métiers de bouche, pour atteindre une masse critique suffisante, tout en continuant à promouvoir les mêmes valeurs.
Qu’attendez-vous du projet PlateformCoop ?
De nous procurer de la visibilité pour nous développer ! Çà passera par de la communication mutualisée avec les autres acteurs de plateformes coopératives, et également par de la mise en relation avec les collectivité territoriales investies dans le projet PlateformCoop. Des rendez-vous sont déjà en cours !
Propos recueillis auprès de Christophe Longle – Février 2023