Interview de Caroline Paul, Chargée de mission ESS, Magali Roger et Anthony FAGOT, Chargés de mission innovation sociale et médiation numérique.
La MEL s’est investie, avec 5 autres collectivités, dans le parcours proposé par l’Apes : il s’agit d’un cycle de qualification visant à accompagner des collectivités territoriales dans leur soutien à l'émergence et au développement d'initiatives de plateformes locales et solidaires.
1) Votre collectivité anime-t-elle une politique en matière de numérique ?
A travers sa stratégie numérique, la MEL souhaite accompagner les transformations sociétales liées au numérique. A titre d’exemple, en 2017 et 2019, la MEL a organisé dans cet esprit le « Grand Barouf Numérique » qui a permis d’aborder un large spectre de questionnements autour du lien entre d’une part, le numérique, d’autre part, les enjeux liés aux Communs, à l’emploi, à l’éthique.
2) Quel lien faites-vous entre l’économie solidaire et les plateformes ?
Il y a un déficit de connaissance des plateformes coopératives par les porteurs de projets ESS, par défaut de visibilité, alors que des mutualisations pourraient soulager des porteurs de projet d’une partie des investissements logiciels. Et une meilleure lisibilité des plateformes existantes permettrait de flécher plus efficacement les fonds ou les actions, vers les spécificités nécessaires à chaque projet. Les plateformes coopératives sont des acteurs économiques qui doivent infuser l’économie classique pour garantir un impact social et sociétal. Elles peuvent participer à une forme de souveraineté numérique et à relocaliser des emplois pérennes et de qualité. La MEL peut jouer un rôle de vigie avec d’autres acteurs institutionnels, ceux du monde l’ESS, des associations, des collectifs... pour accompagner les Communs. Ces derniers, tout comme les plateformes coopératives sont des vecteurs de mutualisation, de rationalisation de l’argent public et d’ancrage local de la production et de la distribution.
3) Y a-t-il des initiatives locales solidaires sur votre territoire qui pourraient s’appuyer sur une plateforme coopérative ?
L’ALEFPA* à Armentières avec son Atelier Chantier d’Insertion (ACI) Pass’O’Vert propose des services de réparation de vélo ainsi que de la location de vélos. Cette structure pourrait donc s’intégrer dans le collectif et l’application de réparation “Rustine libre” développé par PlateformCoop.
Quant au logiciel d’échange de biens et de services développé par l’Apes avec Tipimi, la MEL a travaillé avec la Conciergerie solidaire 59 et la Compagnie des tiers-lieux pour qu’il puisse être connu et être déployé dans d’autres tiers-lieux.
Il faut que les institutions s’appuient sur ce type de logiciels libres et ouverts, qui préservent notre souveraineté numérique et garantissent la protection des données en plus d’avoir un impact positif sur l’emploi local non délocalisable.
Mais ça suppose de bien identifier les besoins au préalable et de faire se rencontrer les outils et les besoins !
Il faudrait également que les institutions envisagent plus souvent de devenir sociétaire des plateformes coopératives pour soutenir leur développement et augmenter leur crédibilité.
4) Qu’attendez-vous du parcours PlateformCoop proposé par l’Apes ?
Le contrat a été bien rempli ! Nous avons été largement acculturés, avons rencontré les partenaires incontournables et nous avons eu des retours sur expériences.
Ces éléments doivent nous permettre dorénavant de mettre en lumière ces alternatives porteuses de valeurs de solidarités, de coopérations et ancrées localement auprès de nos élus.
Aujourd’hui, nous attendons la sortie du plaidoyer visant à promouvoir les plateformes coopératives. Il nous faut traduire ce nouveau modèle économique en langage administratif, juridique et financier en vue de le diffuser le plus largement possible au sein de nos institutions publiques mais également à l’extérieur.
C’est tout le sens de nos feuilles de route respectives (ESS – Innovation sociale et accompagnement aux usages du numérique) : on passe maintenant à l’expérimentation !
5) En quoi est-il éventuellement complémentaire d’autres accompagnements dont vous avez bénéficié par ailleurs ?
Le parcours présente une réelle complémentarité avec le « Forum des usages coopératifs » biannuel de Brest ou les travaux de la Coop des communs qui permettent de comprendre vraiment ce qu’apporte la coopération sur les territoires et comment la mettre en œuvre.
* Association laïque pour l’éducation, la formation, la prévention et l’autonomie
Propos recueillis par Dominique Dupont le 21 juin 2023