"Il faut revaloriser les métiers du soin," martèle Ahmed Hegazy, directeur de l'Uriopss Hauts-de-France et membre du collectif pour les métiers de l'humain en danger.
"Il faut revaloriser les métiers du soin."
Interview d’Ahmed Hegazy, directeur de l’Uriopss Hauts-de-France et membre du collectif pour les métiers de l’humain en danger*.
- D’où vient la mobilisation de ce collectif ?
- D’un constat formulé depuis pas mal d’années, et dont la crise du Covid a été un révélateur : les métiers de l’humain souffrent d’un déficit d’attractivité. Or toutes les familles, à un moment ou à un autre, ont besoin d’être accompagnées : enfants, personnes âgées, personnes en situation de handicap, de pauvreté, personnes confrontées à des addictions, jeunes menacés d’exclusion... Les professionnels aux côté des personnes vulnérables ont des conditions de travail de plus en plus difficiles, sont en sous-effectif et épuisés… La crise du Covid a amplifié le phénomène et si le gouvernement a revalorisé les salaires à l’hôpital, puis dans les Ehpad pour certains métiers, le social et une partie du médico-social ont été oubliés.
Il y a un sentiment d’injustice car ils se sont beaucoup investis pendant la crise. Et puis au sein d’une même organisation, on se trouve face à des personnels qui ont été augmentés et d’autres non.
Résultat : aujourd’hui, on manque de bras dans les Ehpad, les secteurs de la protection de l’enfance, du handicap… 64 000 postes sont vacants. La qualité d’accompagnement s’en ressent.
- Pourquoi vous être associés entre divers réseaux et fédérations ?
- Nous nous étions coordonnés il y a 2 ans au début de la crise Covid pour nous entraider dans l’urgence, il y avait des réseaux thématiques sur la protection de l’enfance le handicap ou la lutte contre les exclusions et aussi des réseaux plus transversaux comme le nôtre. Nous voulions déjà interpeller ensemble les pouvoirs publics sur nos difficultés. Nous avons gardé ces liens par la suite.
- En quoi consiste cette mobilisation et quels en sont les enjeux ?
- En octobre dernier, nous avions organisé une conférence de presse qui n’a pas eu d’effets. Ces dernières semaines, nous avons manifesté partout en France, avec les salariés, les bénévoles de ces secteurs. A Lille, il y a eu plus de 8000 personnes. Pour l’instant, nous avons obtenu quelques valorisations pour le secteur du handicap… Nous allons continuer à exercer la pression. Au-delà des salaires, il y a d’autres leviers sur lesquels appuyer pour rendre ces métiers plus attractifs : les conditions de travail avec le taux d’encadrement qu’il faudrait augmenter, la formation…In fine, l’enjeu reste celui de la qualité d’accompagnement des plus vulnérables.
- Que pensez-vous des politiques de santé ?
- La santé, ce n’est pas que la médecine de ville ou l’hôpital. Il n’est pas seulement question d’apporter des soins, mais aussi de prendre soin. Quid de la prévention, de l’éducation à la santé ?
Les champs de la santé sont aujourd’hui très cloisonnés : il y a le sanitaire, le social, le médico-social… Il faudrait avoir une lecture transversale en partant de la définition de l’OMS, qui évoque le bien-être physique et mental… Il y aurait un débat nécessaire à animer sur cet enjeu avec l’ensemble des acteurs et des citoyens.
* Parmi les membres du collectif : URIOPSS, Mouvement des Papillons Blancs, FAS, FEHAP, NEXEM, CNAPE, CNAEMO, GNDA, ANMECS…
- A lire :
- la lettre de l'Apes "Prenons soin de la santé"
- le dossier d’Alternatives économiques de janvier 2022 sur l’ĥôpital