Les Constructiv'ESS : de l'effervescence et du sens !

frise-collaborative-constructivess
Voir la frise de la grande et de la petite histoire de l'ESS
  Grande frise en détail [.PDF - 10.54 Mo]
logo constructivess


Profitez de ce retour synthétique sur les riches rencontres métropolitaines de l’ESS de novembre 2019 organisées par l'Apes qui pourra intéresser ceux qui n’y étaient pas, et aussi ceux qui en étaient...

 

 

 

Dialogue après-coup

- Encore des rencontres sur l’ESS ?

- Oui.

- Encore des débats sur l’avenir de la planète, les inégalités sociales, la place de l’économie et de la citoyenneté là-dedans ?

- Oui.

- Encore des présentations d’initiatives d’acteurs, des questionnements sur l’engagement ?

- Oui, oui, oui !

- N’en fait-on pas trop ?

- Non.

- Et pourquoi donc ?

Crédits Héléna Salazar

- Parce qu’on n’en fera jamais trop, pour permettre aux gens de se rencontrer, d’échafauder ensemble des projets, de se ressourcer, de se requestionner sur les voies à prendre, de voir qu’ils ne sont pas seuls dans leur coin, parce que les étudiants y ont trouvé peut-être un stage, les reconvertis de l’économie classique un boulot, les anciens une raison de persévérer, les jeunes un espoir pour demain…

- Ah bon, c’était différent des rencontres habituelles ?

- Oui et non. Il y a eu des choses qu’on connaît déjà, et puis aussi du nouveau, des tentatives de favoriser la participation différemment, peut-être, cette chouette fresque qui retraçait la grande histoire et la petite histoire de l’ESS, avec les mots des gens qui passaient par là, qui ont pu exprimer pourquoi ils étaient là, comment ils avaient croisé la route de l’ESS… Il y a eu de l’intergénérationnel comme on dit… Et puis ces échanges en plus petit comité par thématique, ça allait de la transition écologique à la rénovation urbaine en passant par les communs… A partir d’initiatives concrètes, les gens ont imaginé des pistes de solutions pour le territoire. Un début de travail qui devra être poursuivi…

- Et concrètement ça donne quoi ?

- Les acteurs ont pu échanger sur des solutions pratiques : les financements, les projets… et aussi faire une pause pour envisager des perspectives pour l’ESS de demain, l’impact des lois, ce qu’on peut faire ensemble si on se met tous d’accord, les alliances qu’on peut nouer avec d’autres… on a parlé autant des enjeux européens que du jardin partagé du quartier, animé avec les habitants… C’est ça qui est bien dans ces rencontres ! De petits pas en petits pas, on maille du palpable, du désirable...

- Ca prend du temps !

- Viens donc aux prochaines rencontres sur l’ESS, il y en a régulièrement. Ce sont des moments précieux à caser dans son agenda, c’est important de maintenir la flamme du sens, et c’est-y pas bon d’être ensemble à se retrouver autour de ces valeurs ? Car de sens, on en a besoin non ?

- T’as peut-être raison. Allez, viens boire une bière bio !

Les compte-rendus des ateliers sont disponibles ici.

 

Illustration jeudi l.jpg
Quelques retours des grands témoins du débat.

« L’ESS a une carte à jouer, mais il faut y aller plus radicalement. »

Florence Jany-Catrice, Professeure d’Economie, membre de la Chair’ESS

« Avec ses réponses en termes de pouvoir de vivre et non de pouvoir d’achat, l’ESS répond aux enjeux actuels, écologiques et de solidarités. Il importe aujourd’hui de changer de lunettes : les indicateurs comme le PIB ne sont pas adaptés pour éclairer la situation actuelle. Ils ne permettent pas de voir tout ce qui est hors-économie : le non-marchand, le bénévolat… Le libéralisme poussé très loin a fait des dégâts : on le voit dans les services à la personne lorsqu’ils ont été libéralisés. Alors que l’ESS mettait l’accent sur la qualité du service et la reconnaissance des salariés, ces efforts n’ont pas été considérés dans une logique axée uniquement sur la performance et le quantitatif.

Une ESS en recherche de légitimité
L’ESS peine à obtenir une légitimité politique. L'évaluation de l'utilité sociale / de l'impact social dont on n’a jamais autant parlé, se veut une réponse à cette difficulté alors que dans le même temps, l’État réduit la voilure et que les financements publics sur le mode subvention sont en berne.
Si elle se confond avec la RSE ou les entrepreneurs sociaux, si elle se dilue dans le French Impact, si elle joue à être le sous-traitant de l’action publique, si elle se banalise, l’ESS risque de perdre son âme, ses spécificités. Si les entreprises de l'ESS se lance dans une course à la croissance sous prétexte que  « big is beautiful », elle sera peut être davantage reconnue mais perdra  ce qui fait son ressort : l’innovation sociale, le travail de défrichage et d’émergence.  

Pour s'affirmer telle qu'elle est, l'ESS doit faire valoir sa vision de l'évaluation, une approche qui ne se limite pas au quantitatif mais qui donne une large place aux aspects qualitatifs et surtout qui est produite par l'ensemble des parties prenantes de l'objet évalué. L'évaluaton de l'utilité sociale est nécessairement interne à l'éco système de l'entreprise d'ESS.

détail fresque crédits Héléna 2.jpg

Tranformatrice et ouverte aux alliances

L’ESS doit rester transformatrice, et pas seulement réparatrice. Elle se doit d’être ailleurs que dans des réponses en termes de croissance et d’emplois. Elle ne doit pas se soumettre aux indicateurs qui la desservent, et porter un discours politique sous forme d’alternative.
Par ailleurs, l’ESS est un bon moyen d’allier solidarités et écologie, elle a là une carte à jouer, mais il faut y aller plus radicalement. Ne parlons plus d’ESS, mais d’ESSE, « Economie Sociale, Solidaire et Ecologique ».

Il y a une vaste zone grise entre l’ESS et les grosses entreprises qui sont des championnes du greenwashing. Il est possible de développer des alliances avec des PME si on fait le choix d’une soutenabilité forte, avec une baisse drastique des émissions de gaz à effets de serre. Des petits pas ne suffiront pas... »

« L’ESS peut être inspirante pour les entreprises de la CCI. »

Louis-Philippe Blervacque, dirigeant d’Audiccé, Président de la CCI Grand-Lille et Président de la commission REV3 à la CCI des Hauts de France

« J’ai été heureux de participer aux travaux de Constructiv’ESS. Nous avons avec l’ESS des approches complémentaires, qui vont dans le même sens face aux urgences écologiques et sociales. Nous ne pouvons plus continuer à produire toujours plus à moins cher, et les efforts faits pour aller vers plus d’écologie et de solidarités ne sont pas assez reconnus par les investisseurs et la société en général.

Reconnaître les efforts des entreprises citoyennes
Je suis d’accord sur le fait qu’il ne faut pas tout mélanger. Des entreprises ont un engagement sociétal qui peut être important avec la démarche RSE, certaines s’investissent dans la transition écologique, il faut aussi distinguer les grandes entreprises des PME plus ancrées dans le territoire. L’ESS va plus loin dans le rôle citoyen et sociétal.
Au sein de l’entreprise que je dirige, nous faisons des efforts en ce sens. Depuis l’origine, nous travaillons sur les valeurs, avons impliqué tous les collaborateurs dans la rédaction d’une charte  RSE et nous rencontrons tous les ans sur ce sujet. Les salariés sont incités à s’engager dans le milieu associatif, une part des résultats est distribuée aux collaborateurs et 10 % versés à des associations choisies par le personnel, nous organisons la livraison de paniers dans l’entreprise….
D’autres chantiers doivent être menés pour avancer : repair cafés, solutions de mobilité plus écologiques…

Conjuguer écologique et social
Il y a encore des progrès à faire. Dans l’ESS, la transition écologique pourrait être approfondie, elle devrait effectivement ajouter le E de l’Ecologie à ESS pour devenir ESSE. Dans nos PME aussi, il faut accompagner nos adhérents dans cette voie, conjuguer écologie et social.
Avec sa manière de s’organiser collectivement, son engagement social et sociétal, son ancrage dans le territoire, les coopérations avec les parties prenantes, l’ESS peut être inspirante…

Avec REV3 qui vise à réduire de 75 % les émissions de CO2, nous avons des objectifs ambitieux en matière écologique. Parmi les start up accompagnées par l’accélérateur REV3, un tiers sont des projets de l’ESS : projet logistique des Papillons blancs, linge éco-conçu pour bébés assemblé dans des ESAT de Pain d’Alouette… Nous allons également introduire un module ESS dans les formations de porteurs de projet.
Nous devons avoir un esprit constructif et coopératif face aux enjeux qui sont devant nous. »

et demain


« Les politiques publiques doivent nous soutenir davantage »

Luc Belval, Président de l'Apes

« L’ESS répond aux enjeux sociétaux actuels. En démocratisant l’économie, elle démocratise la société. Nous avons besoin de changer d’échelle. Pour cela, les politiques publiques doivent soutenir davantage nos initiatives, il nous faut aussi développer des alliances avec tous ceux qui vont dans le sens de la transition écologique et solidaire : PME, collectivités, syndicats... »

« Besoin des efforts de tous ! »

Sébastien Deviers, directeur développement économique Communauté de communes du Pévèle Carembault

« Nous aurons besoin des efforts de tous pour avancer massivement vers la transition écologique et solidaire. L’ESS est une formidable défricheuse pleine de créativité. Mais il faut s’allier avec des clusters pour avancer plus vite. »

«N’oublions pas la solidarité internationale ! »

Christiane Bouchart, Vice-présidente développement durable de la MEL, Vice-présidente du RTES

« N’oublions pas les enjeux liés à la mondialisation : avec la coopération décentralisée, il faut établir des liens entre régions, continuer à avancer sur le développement agricole soutenable, créer et relier les régies de quartier du Nord et du Sud, étendre le tourisme solidaire… »

« Un discours politique plus punchy »

Richard Sobel, économiste et philosophe

« L’ESS peut apporter des solutions d’engagement concret aux jeunes qui n’attendent plus le grand soir, par exemple avec les expérimentations autour des communs, d’initiatives écologiques. Elle porte des actions ambitieuses, en associant les habitants, ce que l’État ne sait pas faire. Mais il faut un discours politique plus punchy, en réclamant une réglementation des monnaies au niveau international, des mesures au niveau macro sans lesquelles les actions locales n’auront pas d’impact… »

« Attention à l’ESS-washing »

Jérome Legay, syndicaliste CFDT

« Il n’y aura pas de progrès écologique sans justice sociale. Attention à l’ESS-washing ! Il faut oeuvrer pour que dans les entreprises, les salariés obtiennent la moitié des voix dans les conseils d’administration. »

repas constructiv'ess